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Haute Horlogerie : Mesurer le temps autrement

Vacheron Constantin Traditionnelle tourbillon chronographe - Collection Excellence Platine

Alors que l’édition du magazine No. 13, dans lequel est paru cet article, traite du raffinement ultime, on constate que le temps est sans doute un de ces rares luxes que l’on ne peut s’acheter. Toutefois, nous sommes en état d’apprécier celui-ci davantage en raison de la renaissance des montres de Haute Horlogerie, soit des objets issus d’un grand savoir-faire horloger. Symboles de classicisme et d’expertise, retournons dans le temps pour en savoir un peu plus sur leur point d’origine.

Le renouveau de la culture horlogère, à l’origine de la Haute Horlogerie

Selon le livre À la conquête du temps de Dominique Fléchon, c’est en 1979 que débuta le renouveau de la culture horlogère. Cela a été initié, entre autres, par Osvaldo Patrizzi, fondateur de la maison Antiquorum, lorsqu’il décida d’organiser une vente aux enchères de montres-bracelets. En plus de ces ventes thématiques de référence pour les marques horlogères les plus prestigieuses, il publia des catalogues, des ouvrages spécialisés ainsi que des monographies illustrées et documentées. Par conséquent, avec tous ses efforts déployés, il a contribué à la renaissance de la montre-bracelet de tradition et à les transformer en des objets recherchés aujourd’hui. 

Devant cet engouement, de nombreuses marques historiques rebâtirent leur patrimoine lors des années subséquentes en acquérant certaines de leurs anciennes réalisations pour les présenter dans leurs musées privés. Pensons notamment à OMEGA ainsi que Girard-Perregaux qui commencèrent le bal en 1983 et 1991 respectivement. Cette action, en plus du rejet des montres industrielles à quartz que plusieurs passionnés trouvent sans émotion, puisque la précision de ces montres donne plutôt un moment précis sans référence au temps passé ou futur, ouvrit la porte à un retour de l’horlogerie mécanique et son célèbre tic-tac qui fait vibrer présentement tant d’amateurs.

Le déclin de la montre mécanique

Ce qui explique sans doute le déclin de la montre de poche mécanique, au début des années 70, est qu’elle a vu ses complications horlogères, modules ultraplats et systèmes de remontage automatiques être adaptés par la technologie. La montre-bracelet historique, en ces années, n’avait que rarement accueilli des quantièmes perpétuels, tourbillons ou répétitions à minutes. Au cours de cette période, cet instrument était surtout connu pour sa fonction principale, soit d’afficher l’heure, et non pas en raison des complications (je vous explique plus loin la définition exacte) pour lesquelles on connaît la montre-bracelet aujourd’hui. D’ailleurs, l’heure commençait à apparaître sur plusieurs objets entourant le quotidien des gens.

Ayant été mise hors de combat par le quartz l’espace d’un instant, en raison de sa seule petite, voire grande, ombre au tableau, la montre à fonction mécanique affichait un manque de précision de quelques secondes par mois. De ce fait, tout était donc à reconstruire au début des années 80 selon une vision réinventée de la montre-bracelet. Au milieu de cette décennie, en 1983 pour être plus précis, les manufacturiers s’alignaient sur une approche complètement nouvelle de la montre dans son ensemble : boîte, mécanisme et bracelet composaient désormais un tout où se mariaient originalité, beauté et qualité exemplaire.

De plus, les marques ne voulaient certainement pas demeurer dans l’histoire passée et celles-ci désiraient se projeter vers l’avenir en continuant d’exister au sein de la modernité. Dès ce moment, l’horlogerie technique et l’horlogerie précieuse ont évolué progressivement pour conjuguer ces deux univers où le style, la technique, la joaillerie et l’horlogerie ont fini par ne former qu’un tout. L’objet de désir était désormais repensé sous des formes historiques inspirées de boîtiers que nous retrouvions au début du siècle dernier. En regardant vers le passé, ces modèles ont su devenir l’inspiration du futur.

Une nouvelle ère horlogère

Fabrication du boîtier de la Vacheron Constantin Traditionnelle tourbillon chronographe - Collection Excellence Platine - Haute Horlogerie

Fabrication du boîtier de la Vacheron Constantin Traditionnelle tourbillon chronographe – Collection Excellence Platine
Photo : Vacheron Constantin

Ainsi, on constate par le fait même le début d’une nouvelle vague horlogère avec l’adaptation de modèles historiques et de nouvelles créations mettant de l’avant des conceptions aux dimensions uniques afin de démontrer la créativité, la connaissance et l’expertise des différents corps de métiers de l’horlogerie, soit les horlogers, les cadraniers, les joailliers, les émailleurs ainsi que les graveurs.

À titre d’exemple, Cartier a totalement renouvelé, en 1996, sa célèbre montre Tank dont le modèle d’origine date de 1919. L’ajout de courbes à son boîtier carré, tout en l’intégrant au bracelet, rappelle le passé joaillier de l’horloger. Pour cette compagnie prestigieuse et d’autres marques, ces changements sont facilement observables en vertu de la mutation de leurs formes. Ce nouvel art, où l’on revisite des montres classiques tout en plaçant de l’avant le talent des différents artisans, ajoute désormais les complications en plus de proposer un mariage entre élégance et savoir-faire.

La création de la Fondation  de la Haute Horlogerie

C’est au début des années 2000 que la notion de Haute Horlogerie technique et précieuse fait son apparition. Entérinée en 2005, par la création, à Genève, de la Fondation de la Haute Horlogerie, ce cercle soutenu par des marques partenaires telles qu’Audemars Piguet, Breitling, Bulgari, Carl F. Bucherer, Cartier, Jaeger-LeCoultre, Panerai — elle est à l’origine de la grosseur de du 44 mm des montres d’aujourd’hui, suite à l’adaptation pour le grand public de ses modèles créés pour la marine italienne, en 1988 — Ulysse Nardin, Vacheron-Constatin, TAG Heuer et Van Cleef & Arpels, se placera désormais comme une organisation à but non lucratif servant de point de référence et de neutralité pour tous les sujets ayant trait à l’horlogerie. 

Les complications de la Haute Horlogerie

À titre d’introduction, il faut savoir qu’une complication représente une fonction autre que l’affichage des heures et des minutes dans ce domaine technique. Au cours des prochaines lignes, je vous ferai découvrir quelques complications faisant la renommée des montres de la Haute Horlogerie.

Les montres à tourbillon 

La Audermars Piguet - Royal Oak « Jumbo » Squelette Extra-Plat

La Audermars Piguet – Royal Oak « Jumbo » Squelette Extra-Plat
Photo : Audermars Piguet

Pour ceux qui ignorent ce qu’est le tourbillon, il s’agit simplement d’une complication horlogère ajoutée au mécanisme d’échappement. Il est destiné à améliorer la précision des montres mécaniques en contrebalançant les perturbations de l’isochronisme du résonateur à cause de la gravité terrestre. Ce mécanisme fut inventé par l’horloger suisse Abraham-Louis Breguet, fondateur de la célèbre marque du même nom, en 1801.

Le premier tourbillon automatique pour montre-bracelet fut créé par Maurice Grimm et André Beyner, pour Audemars Piguet, en 1986. Il étonne par l’épaisseur de son boîtier (2,5 mm) ainsi que par son emplacement, soit à 11 heures sur le cadran. De ce fait, cette réalisation exceptionnelle a su remettre au goût du jour l’une des inventions majeures de l’horlogerie. Quatre ans plus tard, le duo imagine, pour OMEGA cette fois, le premier tourbillon central.

Depuis, cette complication ne cesse d’évoluer et nous l’avons récemment observé sur la TAG Heuer Carrera Chronograph Tourbillon dont nous vous dans cet article. Il ne faudrait pas oublier également la Impérador Coussin Tourbillon Automatique Extra-plat de Piaget, dévoilée en 2010, une montre à remontage automatique avec régulateur à tourbillon dont le micro-rotor est profondément intégré dans l’épaisseur du mouvement du côté du cadran. Ayant une épaisseur de 10,4 mm, cet objet mythique est le plus mince au monde.

Bien que les tourbillons soient moins précis et plus coûteux à produire que les montres à quartz, ces diverses altérations et améliorations, dont le gyrotourbillon, font de cette complication un objet de plus en plus recherché sur les diverses montres et chronographes mécaniques d’aujourd’hui.

Une nouvelle ère de complications

Le Calibre OMEGA 3861 et son Échappement Co-Axial

Le Calibre OMEGA 3861 et son Échappement Co-Axial
Photo : OMEGA

Tel que dit antérieurement, le tourbillon a fait énormément parler de lui au cours des dernières années, mais c’est le Calibre 89 de Patek Philippe qui est maintenant vu comme la référence de l’horlogerie mécanique portable. Présenté en 1989 — il tire d’ailleurs son nom de cette référence —, c’est-à-dire lors du 150anniversaire de la célèbre marque suisse, celui-ci est le résultat de plus de neuf années de recherche et développement. Il accompagne son boîtier d’un diamètre de 88,2 mm et d’une épaisseur de 41,07 mm abritant pas moins de 1728 composants qui animent les 33 fonctions de cette montre de poche. Représentant le retour en force du savoir-faire de l’art horloger, cette montre surpasse en nombre de fonctions plusieurs modèles sortis au cours du siècle dernier. Le Calibre 89 demeure à ce jour une inspiration pour la famille Patek Philippe ainsi que pour ses concurrents.

Quelques années plus tard, en 1991, la compagnie Blancpain produit six montres-bracelets qui contribuent à cimenter les six principales complications de la culture horlogère, soit le calendrier à phases de Lune, le quantième perpétuel, le chronographe à rattrapante, la répétition à minutes, le mouvement ultraplat et le tourbillon. À titre informatif, le modèle 1735 les réunit en une seule montre-bracelet à grande complication de 740 éléments.

Ainsi, les maîtres horlogers affinent constamment leurs recherches en pensant à de nouvelles solutions pour résoudre les difficultés techniques. Que ce soit dans le but d’augmenter l’autonomie de fonctionnement des mécanismes, de les rendre plus précis ou d’éliminer leur lubrification, ceux-ci sont en quête de la perfection mécanique. Par exemple, c’est le maître horloger anglais George Daniels, sur l’OMEGA De Ville, qui a trouvé la façon d’abandonner l’huilage des composants de la montre avec l’échappement coaxial. 

La Montre d’aviation UTC (Temps Universel Coordonné) de IWC Calibre A/30710 Référence IW3251

La Montre d’aviation UTC (Temps Universel Coordonné) de IWC Calibre A/30710 Référence IW3251
Photo: IWC

À cet effet, ce n’est qu’un survol de quelques complications que nous vous avons présentées ici. Bien que leur avancement aide grandement au mécanisme de la montre mécanique, elles sont peu utilisées dans la vie concrète de tous les jours. Pensons à la marque A. Lange & Söhne et sa Lange 1 qui fut la première montre à grande date aux deux guichets surdimensionnés ou la Reverso, de Jaeger-LeCoultre, qui au cours de son évolution, s’est enrichie de toutes les grandes complications traditionnelles telles que les heures universelles et les deux fuseaux horaires.

Il ne faudrait pas non plus passer sous silence la montre d’aviation UTC (Temps Universel Coordonné) Calibre A/30710 Référence IW3251 d’IWC ( en haut) qui, en 1998, innova en coordonnant le temps universel, permettant non seulement de lire les différentes heures et dates dans le monde, mais aussi de changer l’heure et la date en utilisant simplement la couronne. Une solution parfaite pour les grands voyageurs d’aujourd’hui.

Alors quelle sera votre prochaine (première ?) montre  de Haute Horlogerie?

Article publié originalement dans le magazine Gentologie No. 13. Abonnez-vous au Club par Gentologie dès maintenant !

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